Les enfants de l’école primaire d’Erlimatt découvrent la radio et le droit

09.04.2020 - 12:14 | Milena Palm

Dans le cadre de sa tournée pour les droits de l’enfant, la Radiomobile de la Fondation Village d’enfants Pestalozzi a organisé un «live» du 20 au 30 novembre 2019. La Fondation avait au préalable tiré au sort les écoles qui participeraient gratuitement au projet. Parmi les douze gagnants se trouvait l’école Erlimatt de Pratteln (BL).

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Après s’y être longuement préparés, les élèves diffusent aujourd’hui à la radio leurs billets relatifs aux droits de l’enfant.

L’une des premières contributions des élèves de l’école Erlimatt a été de nous faire entendre l’hymne de leur établissement: «[...] Ob gross oder chli oder dick oder dünn. Ob schnäll oder langsam, isch egal. Ob türkisch, englisch, serbisch, italienisch und dütsch – mier alli verstönd eus glich. Denn mier sind e Schuel, mier gsehnd uns jede Tag. Mier gönd mitenand durch dick und dünn.» Habités de la même passion, ils chantent leur cohésion et le fait que chaque élève a le droit de faire partie de leur communauté, peu importe son origine, son apparence ou la langue qu’il ou elle parle. En effet, tous les enfants ont le droit de ne pas être victime de discrimination. Ça, les enfants d’Erlimatt l’ont bien compris – au moins depuis qu’ils se préparent au projet.

«Même lorsque les parents disent ‹non›, les enfants doivent oser parler.»

Alisha – Elève

Silence, on tourne!

Attention, le signal est sur le point d’être donné: Mara et Rebecca seront bientôt à l’antenne. Elles ont préparé en classe les billets qu’elles s’apprêtent à diffuser en direct. En effet, la classe s’est vue communiquer au préalable un droit de l’enfant que les élèves doivent aborder de diverses manières dans leurs billets. Équipées de leurs aide-mémoire et visiblement nerveuses, les deux jeunes filles attendent dans le bus de faire leur grande entrée. Toutes deux assises, elles parcourent encore une fois ensemble les textes et le déroulé de l’émission. Ces derniers préparatifs ne laissent que peu de place à la détente. Soudain, c’est parti: «Salut! Je m’appelle Rebecca, je suis Mara, et vous êtes sur Radio Pestalozziii», lancent-elles en début d’émission. Lorsque les filles ont terminé, la tension sur leur visage laisse place à un rire empreint de fierté.

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Alisha considère qu’il est important que les enfants connaissent leurs droits et qu’ils les défendent de pied ferme.

Évaluer les enfants

L’ambiance est bien loin d’être aussi tendue à l’extérieur du bus. Durant les pauses, les autres enfants bourdonnent autour de la Radiomobile comme des abeilles autour de leur ruche. Dès que leurs camarades sont à l’antenne, ils écoutent avec excitation et seuls un «psst» se fait entendre de-ci de-là. Quand la musique retentit pour marquer la fin d’un billet, ils l’accompagnent de leurs chants et de leurs danses. Tendus, les animateurs et animatrices radio qui sortent du bus, un sourire encore crispé sur les lèvres, finissent eux aussi par se laisser entraîner par la bonne humeur. C’est également le cas d’Alisha. «On est passé à la radio, waouh!», lance-telle rayonnante. Son visage redevient plus sérieux lorsqu’elle explique son interprétation des droits de l’enfant: «De nombreux enfants n’ont pas la chance d’avoir une belle enfance, car ils ne peuvent pas aller à l’école, par exemple.» Pour cette raison, les enfants devraient connaître leurs droits et les défendre de pied ferme. Et notamment le droit des enfants d’exprimer leur opinion. «Même lorsque les parents disent ‹non›, les enfants doivent oser parler», estime la jeune fille de 10 ans. Alicia (12 ans) a concentré ses recherches sur les différences entre les systèmes scolaires. Dans son billet, elle a décidé de se pencher plus particulièrement sur l’éducation en Iran. Là-bas, les enfants sont obligés d’aller à l’école jusqu’à leur onzième anniversaire. Ensuite, c’est aux parents de décider, et ils retirent souvent leurs filles de l’école. «Je ne trouve pas ça juste. Tous les êtres humains sont égaux et ont le droit d’apprendre les mêmes choses.» Adam aussi est convaincu que l’éducation est un facteur crucial et que chaque enfant devrait aller à l’école. Il a découvert qu’au Ghana, deux tiers des enfants ne peuvent pas aller à l’école. «Ce n’est vraiment pas juste», déclare le jeune garçon (11 ans). On ne trouve pas d’emploi sans éducation. «Quelle que soit notre situation, nous avons plus de chances en Suisse.» Iso, Kevin et Rehad ont eux aussi travaillé sur ce sujet pour leur intervention à la radio: «Nous devrions nous estimer heureux de vivre en Suisse et de pouvoir aller à l’école.»

«Les classes se sont penchées avec assiduité sur les articles juridiques pourtant complexes détaillant les droits des enfants et ont réussi à les assimiler.»

Samantha Kuster – éducatrice pour les projets à la radio

Les droits des enfants au quotidien

Samantha Kuster, éducatrice responsable de la radio, dresse également un bilan de l’expérience: «Les classes se sont penchées avec assiduité sur les articles juridiques pourtant complexes détaillant les droits des enfants et ont réussi à les assimiler.» Ainsi, certains enfant se sont intéressés au droit d’avoir des loisirs et l’ont mis en relation avec les dangers des jeux en ligne. «Un groupe de jeunes filles a consacré ses recherches aux grossesses et aux IVG chez les adolescentes, interviewant à cette occasion une influenceuse suisse.» L’accent a été mis sur l’article 6 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, qui stipule que les États signataires sont tenus de garantir le droit inhérent à chaque enfant durant toute leur vie. Enseignante, Antje Kern a observé que les élèves avaient compris de nombreux points et qu’ils les ont appliqués au quotidien. «Lorsque les enfants discutent, j’ai déjà pu entendre ‹Hé, tu peux arrêter? J’ai le droit d’avoir une opinion et de la donner›.» Elle ajoute que les enfants commencent à mettre correctement en pratique entre eux les droits qu’ils viennent d’apprendre. Des débats passionnants sont également nés durant les préparatifs minutieux, notamment au sujet de la démocratie. Antje Kern trouve ces discussions très enrichissantes, car elles permettent de mieux sensibiliser les élèves aux droits qui sont les leurs. Au cours du projet, la classe a également beaucoup appris au sujet des possibilités de ce média qu’est la radio. Une étape décisive a été de trouver le thème que les élèves souhaitaient aborder ainsi que la manière de présenter leurs billets. «Nous y avons investi beaucoup de temps, aussi bien les enfants que les enseignants. Notamment parce que cela nous tenait à coeur de nous immerger dans l’univers de la radio», explique Antje Kern. L’enseignante se dit fière du résultat: «Tous les enfants ont été suffisamment courageux pour prendre la parole au micro.» Entre les premières réflexions et la décision finale de ce que l’on veut apporter au public, un long chemin a été parcouru, estime Antje Kern. «Les enfants ont fait preuve d’une grande maturité et de beaucoup de responsabilité.»

«ida on air», mais qu’est-ce que c’est?

Dans le cadre du projet «ida on air», les jeunes conçoivent leurs propres émissions radio sur les questions de genre et les thèmes interreligieux: ils se penchent sur les stéréotypes de genre et discutent de leurs propres idéologies ou religions ainsi que de celles des autres. Le projet a vu le jour avec la coopération du Centre de compétences pour l’intégration et l’égalité des chances du canton de Saint-Gall, qui le subventionne. «ida on air» aborde en long et en large les questions de l’homophobie et de la transphobie, de l’identité et des valeurs, de l’égalité des chances et de la discrimination, des stéréotypes et de la diversité, des prescriptions et des rites ou des religions et des idéologies. Ainsi, le projet traite des questions essentielles de notre temps. Les jeunes y apprennent non seulement à se forger leurs propres opinions, mais y développent également leur sensibilité pour la diversité sociale et les modes de vie divers. Grâce à ce média qu’est la radio, les jeunes assument en outre la responsabilité de leurs émissions et bénéficient d’une plate-forme pour exprimer leurs avis. Peuvent y participer les classes, les groupes d’activités extrascolaires pour la jeunesse, les associations et les organisations de jeunes ainsi que les associations culturelles du canton de Saint-Gall.

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